La gamification, tout le monde en parle, même les geeks (Vincent Coste abordait le sujet récemment sur ce blog).
Quand le business s’inspire des MMOG
Derrière le concept de gamification se cachent deux réalités.
D’un côté on trouve deux typologies de jeux, les serious games (ex: Foldit qui permet de faire avancer la science en pliant des protéines) ou le social gaming, avec des jeux superstars comme Farmville de Zynga (récemment détrôné par Cityville… de Zynga) ou Angry Birds de Rovio.
De l’autre côté, la gamification désigne un procédé Marketing qui consiste à ajouter une dose de jeu dans un business afin de créer l’engagement du consommateur.
Comment ça marche ?
La gamification a le pouvoir (magique ?) de rendre attractives, voire addictives, les activités du quotidien les plus banales. Les mots clés de la gamification: points, badges, niveaux, statuts, tableaux de classement, avatar, sont très similaires au vocabulaire des MMOG (Massively Multiplayer Online Games) type World of Warcraft et ce n’est pas un hasard. Dans un système « gamifié », les différentes actions d’un joueur sont récompensées: achat, posts, quizz, parrainage etc. Le cumul des points permet de gagner un badge et/ou d’élever son statut dans le jeu. Plus le joueur progresse, plus il débloque de nouvelles fonctionnalités et des accès (ventes privées, possibilité de customisation de son espace ou de son avatar etc) ou tout autre bonus réservé à son niveau.
Ces mécanismes s’appliquent particulièrement bien à des sites de e-commerce et peuvent être déclinés à différents types de produits. Attention cependant à rester fidèle à l’image de la marque. Dans le Luxe par exemple, qui est tombé sous le charme de la gamification, il n’est pas question d’offrir des produits gratuits ou des coupons de réduction. Il importe à cette clientèle d’avoir un statut exclusif et un accès privilégié à la marque.
Où sont mes fans ?
Maintenant qu’ils ont saturé Facebook, les marketeurs se posent à nouveau la question: quel moyen utiliser pour entrer en conversation avec mes consommateurs ?
La gamification répond à cette problématique et permet tout simplement de s’adapter à l’environnement actuel. Quelques chiffres qui font tourner la tête:
- Un joueur de WOW y consacre en moyenne 6h par jour, soit presque un job à temps plein.
- Les jeunes américains passent l’équivalent d’un cycle scolaire complet (collège / lycée) à jouer aux jeux vidéo (10 000h).
- 3 millions d’heures sont consacrées chaque semaine à des jeux comme Angry Birds, GTA ou Farmville.
Jane Mc Gonigal, qui dirige le programme de recherche sur les jeux vidéo à l’Institute for the Future, en parle très bien dans une session à Ted. Les nouvelles générations sont connectées en permanence, tournées vers les réseaux sociaux et fans de jeux vidéo depuis leur plus jeune âge. Elles s’attendent à retrouver ce même type d’expérience (du fun, du challenge et de la sociabilité) dans tous les aspects de leur vie. Le seul moyen de les attirer est d’entrer dans leur monde, en bref de les faire jouer.
Des stratégies d’hier et d’aujourd’hui
Les premiers à avoir utilisé la gamification sont les compagnies aériennes avec leurs programmes de fidélité, les Frequent Flyer Programs. A l’époque on ne parlait pas de gamification mais c’est bien de ça qu’il s’agit : plus vous volez, plus vous accumulez de points (les miles). Un certain nombre de points vous permet d’atteindre un nouveau statut (Ivory, Gold…) et débloque des avantages : accès à un lounge VIP dans les aéroports, espaces réservés pour l’enregistrement, file d’attente prioritaire pour embarquer etc.
Aujourd’hui, les applications qui proposent de transformer l’expérience du consommateur en jeu se multiplient. Parmi les plus connues, on trouve bien sûr Foursquare et ses célèbres partenariats avec Mc Donald’s, Starbuck et même Jimmy Choo.
Les autres grands spécialistes du genre sont SCVNGR, une application mobile qui permet de créer des chasses aux trésors. Le site de vente en ligne de chaussures Zappos commence tout juste à se gamifier avec la création d’un statut « VIP », un système de badges et des avatars.
La tendance est en marche et il est essentiel d’être les premiers : lorsqu’une marque se lance dans la gamification, elle a de fait un avantage concurrentiel évident. Prenons l’exemple de Nike et son programme Nike+: un capteur placé dans la chaussure permet aux coureurs d’enregistrer, de suivre et de publier leurs performances. Lorsqu’ils doivent renouveler leurs chaussures, nul doute qu’ils auront tendance à racheter des Nike pour ne pas perdre tout le bénéfice de ce « jeu ».
Convaincu par la théorie, on met en pratique ?
While the last decade was the decade of social, and the decade of where the framework in which we connect with other people was built, this next decade will be the decade where the game framework is built, where the motivations we use to actually influence behavior and the framework in which that is constructed is decided upon.
Cette citation de Seth Priebatsch, CEO de SCVNGR, définit bien l’importance du phénomène : il représente un enjeu pour la décennie que nous vivons, succédant à celle des réseaux sociaux aujourd’hui bien ancrés.
OK mais… concrètement, comment on fait ?
Les applications gamifiées fleurissent dans tout type de secteur: sport, luxe, finance, santé, éducation, science… Il existe des spécialistes dans ce domaine aux Etats-Unis : les GSP (Gamification Service Provider) tels Bigdoor ou Badgeville, qui proposent des API aux marques voulant incorporer des éléments de jeu dans leurs sites. Au-delà de fournir des API, ces acteurs proposent également des services de consulting car la gamification ne s’improvise pas, sinon gare aux dérives. Ce qu’aujourd’hui beaucoup critiquent, c’est la « Pointsification« , le phénomène qui consiste à mettre des systèmes de points ou de badges à tout bout de champ.
Avant de se lancer dans la gamification, il faut se poser les bonnes questions :
- Pourquoi gamifier mon site ?
- Quelles actions de mes utilisateurs est-ce que je souhaite engendrer ?
- Quels mécanismes, parmi toute la panoplie existante, dois-je mettre en place ?
- Comment enrichir l’expérience utilisateur?
S’il est possible de faire de l’A/B testing ou du MVT (Multi-Variable Testing) en amont de la démarche, il est indispensable de mettre en place des outils d’analytics pour mesurer l’impact des changements effectués sur le site.
Il n’y a finalement rien de magique dans la gamification : elle ne se substitue pas aux procédés habituels du Webmarketing mais constitue un nouveau pan de jeu efficace.